Tout savoir sur la filière cacao

Un long processus peu connu des consommateurs

filière cacao : de la culture des fèves à la tablette

Avant de titiller nos palais, le chocolat passe par de nombreuses étapes. Le cacao est d’abord cultivé, récolté, séché et parfois fermenté, par des producteurs. C’est le long des tropiques à travers le monde que se répartissent près de 6 millions de producteurs de cacao, ces hommes et ces femmes qui cultivent les précieuses fèves qui donnent naissance au chocolat que nous savourons tous. Et c’est plus précisément en Afrique de l’Ouest que se concentre principalement l’activité cacaoyère industrielle : plus de 3/4 de la production mondiale provient du Ghana et de la Côte d’Ivoire.

Ensuite le cacao est regroupé par des collecteurs/négociants qui rassemblent les différentes récoltes de producteurs et se chargent du transport vers des exportateurs. Ces derniers vendent le cacao pour une première transformation qui consiste à décortiquer, torréfier et broyer les fèves pour obtenir ce qu’on appelle la masse de cacao. Cette étape permet également de produire le beurre et la poudre de cacao.

Cette masse part ensuite pour une deuxième transformation et devient du chocolat de couverture, sous forme liquide ou solide (pastilles de chocolat). Ce produit est la base du chocolatier qui le fondera, le moulera, l’enrobera pour en faire des tablettes, des pralines et les autres produits chocolatiers que nous connaissons tous.

Au début, toutes ces étapes étaient réalisées par des acteurs différents et spécialisés. Petit à petit, la filière du cacao est devenue plus opaque. Il est aujourd’hui très difficile pour le consommateurs de connaitre l’origine du cacao qu’ils dégustent.

Des prix non-rémunérateurs pour les producteurs

Si le chocolat fait bien souvent le bonheur des consommateurs, il n’en est pas de même pour ceux qui en produisent la matière première. En effet, les cacaoculteurs font face à un défi immense, celui de vivre dignement de leur travail et de recevoir une juste rémunération pour leur production. Retour à l’origine du problème : lorsque les fèves sont récoltées, elles passent rapidement entre les mains de puissantes multinationales qui imposent des prix d’achat beaucoup trop bas aux producteurs. Ils sont 6 géants industriels à contrôler près de 95% du marché, de la transformation des fèves à la confection du chocolat que nous retrouvons dans nos tablettes. Ce sont eux qui font la pluie et le beau temps sur le marché. Même les plus grandes marques de chocolat que nous retrouvons dans les rayons des magasins, pour la plupart, n’ont plus le contact direct avec les producteurs. Elles achètent leur matière première à cette poignée de multinationales.

Et la situation s’est fortement dégradée ces dernières années pour les cacaoculteurs…

seulement 6% du prix de la tablette de chocolat revient aux producteurs

Imaginez que sur chaque tablette de chocolat, seulement 6% du prix que nous payons revient aux producteurs, alors qu’il représentait encore 16% dans les années 80. De plus, le prix payé aux producteurs par les multinationales a été divisé par 2 en trente ans. Cette réalité reflète un système où les bénéfices sont capturés par quelques-uns, tandis que ceux qui produisent le cacao restent dans l’ombre.

Pire encore, les prix du cacao fluctuent de manière imprévisible. Les variations brutales accentuent les difficultés déjà présentes dans la vie des producteurs. Leurs revenus incertains les plongent dans une précarité et une insécurité constante.

Un coût écologique

Pour satisfaire la demande croissante des consommateurs et les exigences de profits des multinationales, les industriels ont développé des formes hybrides de cacao qui font la promesse de rendements très élevés. Si cela s’avère exact à court terme, cette production de cacao de masse devient rapidement catastrophique pour l’environnement. En effet, ces cacaos hybrides, issus de recherche de laboratoires, sont mal adaptés à leur milieu et n’ont pas développé les armes nécessaires pour se protéger contre les maladies et autres attaques parasitaires auxquelles ils sont naturellement soumis. Par conséquent, les producteurs doivent user d’intrants chimiques (pesticides, insecticides) pour protéger leurs fragiles cacaoyers. C’est le point de départ d’un cercle vicieux…


En effet, qui dit “intrants chimiques” dit “appauvrissement du sol”. Les rendements commencent donc à chuter. Pour combler les pertes de production et continuer à satisfaire aux exigences des multinationales, les producteurs n’ont d’autre choix que de créer des nouveaux espaces de culture. Et cela se fait au détriment de la forêt. Les producteurs détruisent des forêts primaires pour replanter de nouveaux plants de cacao hybride, qui a leur tour, ont grandement besoin d’intrants chimiques pour subsister. Et le cycle infernal se poursuit inexorablement. Vous l’avez compris, la production de cacao industriel est une véritable plaie pour les milieux naturels.

cercle vicieux de la demande croissante en cacao

Pour illustrer cette catastrophe écologique, notons que la Côte d’Ivoire a perdu 85% de ses forêts à cause du cacao de masse. La déforestation représente 95% de l’empreinte carbone de la production du cacao industriel.

Mis devant leurs responsabilités et forcés d’agir, les industriels du cacao se sont lancés dans des grands programmes de durabilité à grands coups de communication. Ne soyons pas naïfs, l’objectif principal est de continuer à sécuriser leur approvisionnement à bas coûts tout en affichant un impact positif pour l’environnement. C’est ainsi qu’on peut lire qu’aujourd’hui, sur 12 millions d’hectares de cacao cultivé, 1/3 est certifié “durable”. Et pour les producteurs? Et bien, rien ne change car les programmes de durabilité des multinationales et autres les labels durables ne garantissent en rien le développement, ni un prix rémunérateur pour les producteurs. De plus force est de constater que ces grands acteurs du cacao continue à soutenir un modèle d’agriculture intensive, néfaste pour l’environnement.

Y a-t-il quand même des solutions?

Faut-il renoncer au plaisir du chocolat pour autant ? Absolument pas !

En matière de revenus des producteurs, des acteurs du monde du cacao, comme ETHIQUABLE, agissent depuis des années. Les labels équitables, tels que le SPP, garantissent un prix rémunérateur, offrant ainsi une juste rémunération aux producteurs. Ce juste prix s’accompagne de projets de développement et d’une autonomisation des producteurs afin qu’ils retrouvent le pouvoir qui leur est légitime dans la filière du cacao.

filière cacao

Contrairement aux producteurs de cacao industriel, nos producteurs s’occupent eux-mêmes de la fermentation, de l’exportation et de la première transformation (de la fève en masse de cacao). Ils créent donc eux-mêmes de la valeur ajoutée sur leur cacao et sont maîtres de sa commercialisation. Ils développent ainsi leurs coopératives, obtiennent de meilleurs prix et sécurisent leurs revenus.

En ce qui concerne l’environnement, l’agriculture intensive industrielle n’a pas sa place chez nous. Elle est utilement remplacée par des pratiques agricoles respectueuses de la nature, comme l’agroécologie et l’agroforesterie, des approches qui préservent les écosystèmes tout en garantissant des niveaux de productivité équivalents, voire supérieurs. En utilisant des biofertilisants et en cultivant des variétés anciennes, nous réduisons notre empreinte écologique tout en mettant en avant la qualité des fèves de terroir.

En Côte d’Ivoire, notre partenaire producteur, la SCEB a pu doubler la production de cacao, passant de 500 à 1000 kg/ha, sans avoir recours à l’utilisation de pesticides, d’herbicides ou d’engrais chimiques. De plus, les expériences sur le terrain ont prouvé que la pratique de la culture du cacao bio-équitable favorise la présence de sols vivants, accroit la fertilité et contribue à la croissance de la biodiversité.

Alors, savourez chaque morceau de chocolat, ne vous privez pas, mais choisissez avec conscience. Optez pour un chocolat qui soutient réellement les producteurs et respecte la planète.